Les artistes iraniens toujours verts de rage

Dec 12, 20090 comments

Picture 76La nouvelle a sans doute interpellé Mahmoud Ahmadinejad, le président iranien. Le célèbreMohammad Reza Shajarian maestro de la musique traditionnelle persane, confiait ainsi mi-novembre à une journaliste de l’AP qu’il avait exigé que la radio et la télévision d’Etat cessent de diffuser son oeuvre… “Après la répression de cet été, j’ai dit ‘Stop’ “ affirmait-il. A l’image de Shajarian, les artistes iraniens ont pris le relais des manifestants, exprimant leur désaccord avec le régime. Résultat : le Mouvement vert, (Green movement) comme on l’appelle aujoud’hui, donne lieu à une créativité sans précédent en Iran et au sein de la diaspora iranienne.

En première ligne de la contestation artistique, les graphistes. Très réputé, le graphisme iranien s’est développé depuis les années 70 en réaction aux contraintes imposées aux autres arts, comme la peinture ou la musique. Depuis juin, des dizaines d’affiches contestataires au design coup de poing sont diffusées sur le Net.  Dans le cadre de la journée “Arts United4iran”, plus de 1000 oeuvres ont ainsi déjà été mises en ligne sur Flickr, le site de partage de photos. Le site iranien Green cry publie également une cinquantaine d’affiches. Des images fortes qui brodent autour des figures désormais imposées du mouvement :  le vert, bien sûr, le V de la victoire mais aussi le visage ensanglanté de Neda, la jeune fille tuée lors d’une manifestation le 20 juin, devenue une icône.

Impossible d’afficher ces posters dans les rues de Téhéran ? Qu’importe, leurs motifs sont dessinés sur les billets de banques. Une multitude de ces billets “décorés” circuleraient ainsi dans le pays. “La Banque centrale souhaitait les retirer de la circulation, témoigne Alireza un journaliste de Téhéran, sur le site de France 24. Mais elle a finalement abandonné : il y en a trop”.

Un Bob Dylan iranien

Côté musique, le mouvement a même son Bob Dylan :  Mohsen Namjoo, que le New York Times, comparait déjà en 2007 au chanteur contestataire américain des années 70. Ce musicien, méga-star en Iran dont les albums s’échangent sous le manteau, a dû s’exiler après avoir utilisé des sourates du Coran dans l’une de ses chansons. Il a sorti en octobre un album intitulé Oy, “aïe” (à écouter ici ), aux paroles engagées, enregistré avec la participation de l’actrice Golshifteh Farahani. Dans un message de soutien à United4Iran, il appelle à poursuivre la mobilisation :

En Iran, malgré la répression, une centaine d’artistes ont boycotté les festivals nationaux de cet été. Les personnalités les plus en vue profitent d’invitations à l’étranger pour faire entendre leur voix. Ainsi, le réalisateur Jafar Panahi, dont le film Hors jeu a obtenu l’Ours d’argent au festival de Berlin en 2005, portait, en août dernier,  une écharpe verte au festival international du film de Montréal dont il était le président du jury. Un coup d’éclat, qui lui vaut d’être désormais interdit de sortie du territoire.

Par peur des représailles, la réalisatrice Narges Kalhor a, elle,  profité de sa participation en octobre au festival du film de Nuremberg pour déposer unedemande d’asile politique en Allemagne. Elle y présentait son film Rake, un court-métrage de fiction sur la torture en Iran. Elle vit depuis dans un foyer de réfugiés. Rien de bien original. Sauf que la jeune femme de 25 ans est la fille de Mehdi Kalhor… le conseiller en communication d’Ahmadinejad.

Source:http://www.lavie.fr/l-hebdo/une/article/1798-les-artistes-iraniens-toujours-verts-de-rage/retour/11/hash/06d874a44c.html